La stratégie nationale en faveur de l'intelligence artificielle passe par Paris-Saclay. L'institut DataIA de l'université vient de remporter, avec huit autres sites en France, un appel à manifestation d'intérêt « IA Cluster » pour les « pôles d'excellence en recherche et formation en intelligence artificielle ».

DataIA est la structure qui organise au sein de l'université l'ensemble des actions de formation, recherche et innovation menées par l'établissement dans le domaine de l'IA. La distinction qu'il vient d'obtenir lui garantit une enveloppe d'une vingtaine de millions d'euros d'ici à 2030. En cumulant cette somme avec d'autres financements de l'Etat, l'institut peut d'ores et déjà compter sur quelque 35 millions d'investissement pour les cinq prochaines années.

Massification

« Nous entrons dans une phase de massification. Tous nos étudiants doivent comprendre les enjeux de l'IA car de très nombreux métiers vont être transformés par elle. Nos formations ont pour objectif de leur permettre de s'y préparer », indique la professeure Sarah Cohen-Boulakia, directrice adjointe de DataIA, en charge des formations.

A partir de la rentrée 2025, les 48.000 étudiants de Paris-Saclay, quel que soit leur cursus, seront ainsi sensibilisés à l'IA. Ce « brevet de l'IA » apportera des crédits aux étudiants dans le cadre de leur cursus. Une quinzaine d'heures de cours seront notamment dispensées pour comprendre ce que sont l'IA générative et ses enjeux, comment elle fonctionne, quels en sont les biais, etc. Elles s'appuieront sur une série de jeux (« gamification »).

L'université souhaite par ailleurs former à la recherche et à l'innovation en IA ses meilleurs étudiants, dès les niveaux licence et master. « Nous entendons constituer un pôle de formation de rang mondial dans le domaine de l'intelligence artificielle, permettant d'augmenter considérablement le nombre d'étudiants formés à l'IA. C'est un enjeu national », assure Camille Galap, président de l'Université Paris-Saclay.

Pour ces étudiants confirmés et spécialisés, l'accent sera mis sur l'international. Au niveau licence, master et ingénieur en IA, une partie des étudiants séjourneront plusieurs mois à l'étranger grâce à des bourses, dans le cadre d'échanges avec des étudiants d'autres pays.

Une force de frappe considérable

Avec 800 chercheurs et enseignants travaillant directement dans le domaine, l'Université Paris-Saclay se classe déjà parmi les principaux poids lourds européens et mondiaux. Les chercheurs oeuvrent au sein de l'université, des grandes écoles (CentraleSupélec, ENS Paris-Saclay, Institut d'optique Graduate School, etc.) et des organismes de recherche (CNRS, INRIA, Inserm, Onera, CEA, etc.) de Paris-Saclay, sur les questions de l'IA. Il faut ajouter à ce chiffre environ 200 enseignants et chercheurs travaillant également sur l'IA à l'Institut polytechnique de Paris (IPP). Cette force de frappe d'un millier de personnes s'appuie en outre sur un réseau de start-up et d'entreprises de pointe dans le secteur, notamment dans le domaine de la santé.

Les financements apportés par l'appel à projet doivent également servir à la création de nouvelles chaires d'excellence, impliquant chercheurs et partenaires industriels (IBM, Thalès, Sanofi, Servier, Capgemini et Dassault Systèmes, etc.). « Paris-Saclay représente le premier écosystème de l'IA en France et en Europe, nous souhaitons consolider ce continuum recherche-formation-innovation en décloisonnant les disciplines et en étant capable de s'adapter aux évolutions rapides de l'intelligence artificielle », assure Frédéric Pascal, directeur de DataIA. Ce dernier, professeur à CentraleSupelec, est également vice-président de l'Université Paris-Saclay en charge de l'IA.

Du côté des élus, la mobilisation est aussi à l'ordre du jour. « L'institut Data IA est plus que jamais vital pour l'avenir de notre pays et de l'Europe afin de sensibiliser, former et protéger notre souveraineté nationale dans le domaine de l'IA », estime David Ros, sénateur (PS) de l'Essonne, conseiller départemental et ancien maire d'Orsay.

Par Alain Piffaretti